vendredi 24 octobre 2008

Politique-spectacle

Quand un chien avait mordu un enfant d'environ trois ans et avait causé sa mort, toute la classe politique française s'était mobilisée. C'était il y a de cela quelques mois, et l'affaire m'avait profondément choqué, car ça s'est transformé en quelques jours en une affaire d'Etat. La ministre de l'intérieur faisant des déclarations à tout va, ses collègues se creusant les méninges pour pallier à ce genre d'accident afin qu'il ne se reproduise plus dans le futur. Tout cela était, bien évidemment, hautement comique. La mère du malheureux enfant était invitée à témoigner, ainsi que les voisins, les copains, les copains des copains... et tout le monde était ému. L'émotion était exposé dans un sensationnalisme sans bornes auquel tous les médias ou presque avait succombé.

Cette affaire était révélatrice de l'ambiance générale du débat public en France : les hommes politiques réagissent par rapport à l'actualité, parfois avant même que les faits soient clairs et établis. Ils promettent tout de suite des mesures, des projets de loi, des actions, qui s'avèrent impossibles à appliquer. Les opposants crient au scandale, accusent les dirigeants, critiquent la gestion de la crise... Les médias se déchaînent dans un exposé impudique de la souffrance des uns et des autres, en espérant "émouvoir" le public. Les gens eux, sont priés de s'exprimer, de réagir eux aussi, de faire des réactions par rapport à ce qui s'est passé (c'est scandaleux, choquant, triste...).

Il s'agit d'une situation complètement dégénérée où les faits divers sont devenus le sujet de prédilection des politiciens et des journalistes. A cela il faut ajouter la ferveur médiatique dès qu'il s'agit d'en faire un spectacle, car avec les médias qu'on a aujourd'hui, tout se transforme en spectacle, sinon ce n'est pas franchement intéressant.

Il faut aussi être un peu (beaucoup) manichéen pour pouvoir suivre et comprendre ce que disent ces médias. Un coup c'est les méchants chiens qui attaquent des gosses, un autre c'est les aveugles qui ne peuvent se passer de leur chiens-guides. Un coup ce sont les méchants tunisiens ou franco-maghrébins qui soufflent la Marseillaise, un autre ce sont ces mêmes jeunes qui sont ignorés, délaissés par l'enseble de la société, classe politique en tête...

Ce dernier exemple a été l'élément déclencheur de la rédaction de ce post. Après l'affaire des sifflements, je voulais écrire quelque chose, mais je ne savais pas quoi dire : être "pour" (du moins les justifier) ou "contre" les sifflements, voilà ce que les uns et les autres chercheront à savoir en lisant ma réaction. Mais écrire pour rajouter une couche au buzz ambiant ? A quoi bon ?

A mon avis il faut avoir du recul par rapport à cette affaire et ne pas perdre de vue que ce qui choque vraiment dans cette histoire, c'est que non seulement les médias s'en sont emparés, mais que les politiciens (Président en tête) s'en mêlent.

Ce n'est qu'un match de foot nom d'un chien !

6 commentaires:

Profilo a dit…

je crois qu'il faut d'une part condamner ces personnes qui ont sifflé l'hymne national car ça reste un geste de manque de politesse et de respect et d'autre part condamner cette forte politisation de cette affaire car les "siffleurs" en veulent que ça et deuxièment pour éviter de dire des conneries comme arrêter le match ou ne plus jouer contre les pays du Maghreb.

Mani l'Africain a dit…

1. Je suis contre le sport-spectacle, surtout quand le foot en particulier prend des proportions surdimensionnées par rapport à sa vraie valeur

2. Je suis contre le fait de jouer l'hymne national avant le match. Un match c'est pas la guerre.

3. Dans une perspective plus large, je suis contre les hymnes nationales, et même contre l'idée de nation, mais ça c'est une autre question.

4. Je suis contre le fait de siffler une hymne nationale quelle qu'elle soit.

5. Je suis contre le fait d'instrumentaliser un tel incident, car, rappelons-le, il s'agissait de déstabiliser l'équipe adverse comme dans tous les matchs.

6. Je suis contre les simplifications à deux balles du genre : "ce sont des français d'origine maghrébine mal dans leur peau à cause d'une mauvaise intégration...bla bla bla".

D'autre part, l'antifrancisme primaire dont font preuve certains de nos compatriotes n'a d'égal que la stupidité et le manichéisme de certains hommes politiques français (président en tête).

Pour résumer : c'est le dégoût plus qu'autre chose que je ressens. Et je ne regrette pas de ne pas avoir assisté au match.

@ profilo : je sais pas si ma position est plus claire comme ça.

Roumi a dit…

Je suis tout à fait d'accord avec l'essentiel de ce que tu as dit.

Je suis également contre le fait que l'on joue les hymnes nationaux dans les manifestations sportives, à plus forte raison s'ils sont chantés et qu'on profite de leurs paroles belliqueuses, nationalistes, ... au passage à certains Tunisiens qui s'étonnaient du contenu des paroles de la Marseillaise, ils feraient bien d'étudier la concordance des thématiques des hymnes français et tunisien... et de bien d'autres encore C'est saisissant !
Pour ce qui est d'être contre l'idée de nation, je pense que cela restera longtemps encore une utopie : cela étant dit, je me sens moi même globalement affranchi de cette dimension.

Je suis aussi effectivement contre toutes ces récupérations liées au match de foot ou encore à l'histoire du chien mais il faut bien reconnaître qu'elles ne sont que la conséquence de dérives plus profondes comme l'attitude malsaine de cette presse qui par ailleurs se plaint d'être brimée par le pouvoir... ben en tout cas, elle n'est pas brimée pour faire son beurre avec tant de racolage ! De même les gens se laissent aller à leur propension au voyeurisme, tout en réclamant le respect de leur intimité, tout en se plaignant des fichiers divers qui menaceraient leur sécurité ; il y a là de grands paradoxes. Les hommes politiques, dans leur affrontement stérile gauche-droite, se livrent à une surenchère débile qui consiste à reprocher tout et n'importe quoi à l'autre et surtout lui reprocher de n'avoir pas fait ce qu'il ne pouvait pas prévoir pourtant. Ainsi naissent la plupart de nos lois, des lois parasites qui ne font que répondre à l'émotion ; cela étant dit, il faut remarquer qu'une part de ces lois passe aux oubliettes, n'étant pas accompagnée ultérieurement des décrets ou directives nécessaires à leur application. Cela reste quand même beaucoup de temps, d'énergie et d'argent perdu pour rien.

Il n'en reste pas moins vrai que j'en ai marre de voir des Français siffler leur hymne, marre qu'on considère ces jeunes comme représentatifs des banlieues (comme si la banlieue n'était peuplée que de jeunes immigrés délinquants à cause d'une supposée oppression), des immigrés (c'est gentil pour les immigrés vertueux qui sont ravis d'être là), de la jeunesse (c'est gentil pour les jeunes normaux qui étudient et travaillent sérieusement), ... alors que ces fauteurs de troubles appartiennent à la frange marginale et peu récupérable que compte toute société, même celle qui se revendique la plus proprette.

Unknown a dit…

Faudrait peut-etre ne pas annuler les matchs France- pays du maghreb, mais tout simplement ne plus chanter d'hymnes nationaux. Quand joue un match de foot on ne part pas en guerre!!

BooBoo a dit…

Quand un hymne national vous dit:

Aux armes, citoyens !
Formez vos bataillons !
Marchons, marchons !
"Qu'un sang impur...
Abreuve nos sillons !"

je ne vois pas l'interet de le chanter avant un match de foot sauf si on souhaite inciter a la violence.
Les medias s'interessent a tout, sauf aux vrais problemes: ils n'informent pas, ils cachent Les verites du moment.
On nous bombarde d'informations inutiles, mais les vrais questions n'ont toujours pas de reponse.

Merci pour cette note meme si on diverge sur une des perspectives: l'idée de nation.

Profilo a dit…

il faut savoir que toutes les hymnes nationales ne sont pas une incitation pour la guerre donc je ne vois pas pourquoi on devrait les enlever dans les matchs de foot.
C'est une manière de revigorer les joueurs. en plus, l'hymne a de nos jours encore plus de raison d'être. Je m'explique, un joueur comme se sent-il appartenir à une équipe de football dans le foot professionnel d'aujourd'hui? par le contrat qui le lie qui lui permet de tirer son existence. quand il joue avec l'équipe nationale il n'y pas de rémunération (ou très faible) donc ce qui le lie à ce maillot nationale c'est la nation donc pour revigorer cet attachement on lui fait entonner l'hymne symbole de ce lien