vendredi 20 avril 2007

Idées reçues sur les religions

Les religions sont ma passion*. Plus je creuse la question des religions et plus j’ai envie d’en savoir davantage. Plus je cherche à comprendre les religions, et plus je retombe sur la question du monothéisme.


Ce post constitue un bout d’une recherche personnelle sur les religions. Recherche pas méthodique et loin d’être structurée et qui a déjà été initiée sur ce blog par les posts sur la vision freudienne de la religion (1ère partie et 2ème partie) et sur les influences mésopotamiennes sur les monothéismes (1ère partie et 2ème partie).

Et si on commençait par quelques idées reçues :

Le judaïsme est le premier monothéisme de l’histoire.

Faux. Le premier monothéisme est vraisemblablement le culte de Aton porté par le Pharaon Akhénaton. Les juifs se sont peut-être inspirés de cette religion antérieure au judaïsme. Si l’on croit Freud dans « l’Homme Moïse et la religion monothéiste », le judaïsme ne serait qu’une forme déformée du culte d’Aton. Après la mort d’Akhénaton, le culte des anciens dieux a été rétabli et les prêtres ont réinstauré l’ancienne religion et pourchassé les adeptes de la religion d’Aton. Freud suppose que c’est à ce moment-là que les hébreux adoptent le culte du dieu unique. Il étudie et argumente l’hypothèse selon laquelle Moïse serait un Egyptien, peut-être même un ministre d’Akhénaton !

Fait remarquable : le mot Amen qui se retrouve dans les 3 grands monothéismes peut avoir des racines égyptiennes. Il s’agirait du nom du dieu Amon.

Les religions persanes sont par ailleurs un bel exemple de vision monothéiste du monde : le zoroastrisme érige Ahura Mazda comme dieu du monde. Il est opposé à Ahriman qui personnifie le mal. Le statut d’Ahriman varie selon les époques et les traditions mais on peut dire qu’il avait le statut de dieu. C’est pourquoi on qualifie ces religions de « dualistes ».


Il n’y a que 3 monothéismes dans l’histoire.

Faux. Plusieurs monothéismes ont existé et certains continuent d’exister jusqu’aujourd’hui. Parmi ces monothéismes, il y en a qui sont des sectes qui découlent des grands monothéismes : la religion des druzes, le babisme, le bahaïsme sont des religions qui prennent racine dans l’islam. Les différentes branches du christianisme ne sont pas à dénombrer ici, mais certaines parmi elles ont un statut de religion à part entière, comme l’Eglise mormone (reconnue comme religion aux USA mais considérée comme secte en France !).

Parmi les religions qui ont traversé l’histoire et qui remontent plus loin que l’islam : les sabéens (appelés aussi mandéens, ceux qui suivent Jean (Yahya) le cousin du Christ et le fils de Zacharie), le zoroastrisme (religion officielle des perses pendant des milliers d’années, appelée aussi mazdéisme, évoquée plus haut).

Ma religion préférée reste avant tout le manichéisme (rien à voir avec le sens moderne du mot). Religion prêché pendant le 3ème siècle après J.-C. par un persan appelé Mani (aussi appelé Manès ou Manichaeus, forme grecque de l’araméen Mani Hayy –Mani vivant-), elle insiste aussi sur l’unicité de dieu mais donne beaucoup d’importance à la méditation et à la spiritualité. Son point le plus fort est sa dimension universelle qui tend à unir les peuples et les croyances tout en méprisant la violence (il faut que je prépare un post là-dessus !). L’histoire de Mani est magnifiquement racontée par Amin Maalouf dans « les jardins de lumière ». J’ai tellement aimé ce livre que j’ai décidé de prendre le nom de Mani sur la blogosphère !

Le judaïsme, contrairement aux 2 autres grands monothéismes est une religion « ethnique ».

Faux. Le christianisme et l’islam se présentent aujourd’hui comme « universels » (n’importe qui peut s’y convertir) et on oublie parfois que le judaïsme s’est aussi propagé parmi des peuples non hébraïques. Les arabes de la péninsule arabe préislamique comptaient parmi eux des juifs. Le Yémen était à majorité juive à une époque de son histoire. En Afrique du Nord, certaines tribus berbères se sont aussi converties au judaïsme au point que la résistance aux arabes pendant l’expansion de l’islam a été menée en Tunisie par une femme judéo-berbère !

Plus généralement, on ne peut que s’étonner de l’étendue de cette religion pourtant supposée être ethnocentrique. L’existence de juifs noirs en Abyssinie (les falashas) et de juifs asiatiques en Chine montre que la « pureté » ethnique des juifs n’est qu’un mythe moderne. Plus intéressant encore : l’empire des khazars** (qui sont des tribus turco mongoles) constituent peut-être l’expansion territoriale la plus importante d’un Etat juif. Au 13ème siècle de notre ère, le roi des khazars s’est converti avec sa cour au judaïsme et il a été suivi par la majorité de la population. Les traces de ce peuple se perdent dans les méandres du Moyen-âge, mais il y a de fortes chances que les juifs ashkénazes ne soient la descendance directe de ces tribus (le sujet est tellement passionnant qu’il mériterait un post à lui seul !)

Les religions sont soit polythéistes, soient monothéistes.

Faux. Il est vrai que presque toutes les religions ont des divinités, quelque soit leur nombre. Il est possible de voir une certaine continuité entre les polythéismes et les monothéismes (cf. post précédent). la distinction monothéisme / polythéisme est superficielle et il serait plus judicieux de distinguer les religions de résurrection des religions de réincarnation.

Les religions de résurrection croient en la survie de l’âme après la mort. Elles promettent à leurs fidèles la vie éternelle dans l’au-delà. La vie éternelle a été couplée avec le problème moral (en réponse à la question « comment garantir que les fautifs sur cette terre soient punis ? ») et la solution magique a été d’imaginer 2 sortes d’au-delà : un où l’on souffre pour expier nos fautes et l’autre où on est récompensé de nos bonnes actions (enfer et paradis). Ce sujet est vaste mais notons juste que parmi les premiers à introduire la morale dans la vie de l’au-delà ont été les perses mazdéens, avant les juifs, et qui ont probablement inspiré les juifs !

Les religions de réincarnation sont des religions où l’âme est éternelle mais elle ne migre pas vers l’au-delà, elle s’incarne dans un autre corps et recommence une nouvelle vie ici-bas. Le problème moral n’est pas exclu dans ce cas puisque l’on peut espérer une prochaine vie meilleure que notre vie actuelle si on a été bon moralement. Le cycle de vie est répétitif mais peut se rompre par un nirvana, comme dans le cas du bouddhisme.

Historiquement, l’apparition de ces 2 formes de religions date du 6ème siècle avant J.-C. Il est important de voir qu’à cette époque la sédentarisation battait son plein et que l’être humain avait besoin plus que jamais de règles morales plus restrictives et plus contraignantes du fait de la vie en communauté dans les villages. Géographiquement on peut situer la séparation par le fleuve de l’Indus : les religions de réincarnation se retrouvent à l’est (essentiellement hindouisme mais pas seulement) et les religions de réincarnation se retrouvent à l’ouest (mazdéisme, mithraïsme et autres…)

Les questions essentielles sont à peine effleurées dans ce bref exposé, et j’ai encore besoin de beaucoup de temps avant de commencer à comprendre. Les questions les plus importantes selon moi sont celles qui nous permettent de comprendre notre monde actuel : qu’est-ce qu’il y a de si fort dans le monothéisme pour qu’il perdure aussi longtemps ? Qu’est-ce que le judaïsme a apporté de si précieux pour qu’il soit imité ? Est-ce uniquement un intérêt politique ? Quel apport à la morale les religions monothéistes ont-elles apporté ? et ont-elles vraiment résolu la question morale ? Pourquoi l’empereur romain Constantin a-t-il choisi le christianisme au détriment d’autres religions ? Comment s'est faite la conversion des rois des barbares en Europe ? etc...etc...

Pour ce post, je finirai par une citation que j’adore de Bertrand Russel sur les religions qui traduit bien ma pensée sur la question :


“I am as firmly convinced that religions do harm as I am that they are untrue”


________

* : ce post est dédié à mon ami J. qui se reconnaîtra.
** : pour en savoir plus sur les khazars :

http://www.cclj.be/regards/web/dossiers/khazar.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Khazars
http://www.khazaria.com/

vendredi 13 avril 2007

Amour coupable

(note inspirée par une autre écrite par Naddou : plaisir coupable)

Elle était là tout près de moi, on s’enlaçait presque, nos regards sont complices, nos yeux en disent plus que nos mots.

Des frissons me traversent le corps et j’ai l’impression que je vais m’écrouler à chaque seconde. Je scrute chaque détail de son visage et je me dis que je pourrais la regarder pendant des heures sans me lasser.

C’est soit maintenant, ici, avec elle, ou jamais.

Je ne résiste pas. Je ne résiste plus. Je sais que je suis celui qui occupe ses pensées. Mais c’est avec un autre qu’elle a décidé de faire sa vie.

Je ne résiste pas, « je t’aime » je dis.

Silence.

Elle me regarde dans les yeux. Elle s’y attendait. Un peu embarrassée, elle ne dit rien. Elle se retire un peu et croise les mains. Je savoure la magie de l’instant.

« Ne va pas contre ton cœur. Laisse-toi aller ». J’ai envie de dire. Mais ce que je prononce, ce sont des mots d’excuse.

« Tu sais bien que je suis avec quelqu’un d’autre » elle me dit. Ses yeux disent : « il n’y a que toi dans mon cœur ».

« Tu sais bien que c’est impossible, sans espoir et sans lendemain. » elle me dit. Ce que j’entends c’est : « nous serons l’un pour l’autre, aujourd’hui et pour toujours »

Nous ne sommes pas des amis. Nous ne sommes pas des complices. Nous sommes tout ça, et pire. Nous sommes des amants. Je n’ai pas goûté ses lèvres, mais mon cœur habite chez elle. Mes mains ne connaissent pas son corps mais nos yeux se connaissent comme de vieux amis.

Quand on se rencontre, ce sont nos regards qui s’enlacent et ce sont nos cœurs qui s’embrassent et s’embrasent.

Je suis coupable de l’aimer, mais mon amour est pur. Je ne dois pas la regarder avec désir, mais ses yeux m’y encouragent. Je ne dois pas lui dire des mots d’amour, mais elle aime bien les entendre.

Que faire ? Vivre le présent. Son passé m’échappe. Son futur appartient à un autre. Mais je tiens son présent entre mes mains. Elle est à moi, maintenant, ici. Mon âme lui appartient aussi. Et demain est un autre jour.

dimanche 8 avril 2007

Notre Père qui es aux cieux

Notre Père qui es aux cieux. Voilà quelques années que tu nous as quittés. 7 ans, ou 700, qu’importe. Que valent 7 années quand tu es éternel ?

Excuse-moi si je t’appelle mon Père. C’est parce que quelque part, je sens que tu es mon père. Excuse-moi aussi si je te prends parfois pour le Bon Dieu. C’est parce que les anciens nous parlent de toi comme ils parlent du Bon Dieu.

Tu nous as habitués à ton absence bien avant ton départ final vers l’éternité. Tu nous as quittés quand tu as vu qu’on se débrouillait bien. Quand j’ai grandi, j’ai connu de toi un vieux corps malade qui a traversé le siècle et sur lequel le siècle a laissé ses traces. Lorsque le temps a eu finalement raison de toi, tu l’avais déjà trompé des centaines de fois.

Ne t’inquiète pas pour nous Père ; nous nous en sortons bien. Notre famille est soudée et notre maison est belle et grande. Parfois il nous arrive d’oublier que sans toi, nous n’aurions pas eu une maison à nous. Mais les murs sont là pour nous le rappeler. Chaque coin, chaque fenêtre, chaque brique de cette maison porte encore tes empreintes. Ni le temps ni les hommes n’effaceront tes empreintes, parce qu’elles sont d’abord gravées dans nos cœurs.

La ville que tu as connue a bien changé. Elle est devenu un village. Les gens que tu as connus ne sont plus là, mais leurs bêtises sont toujours les mêmes. Nous sommes amis avec tout le monde, comme tu nous a appris. Nous ne cherchons pas la bagarre et nous restons polis avec nos voisins, comme de ton temps.

Beaucoup de mes frères passent leur temps à parler au Bon Dieu ces derniers jours. Ils croient que notre maison est trop petite pour eux, Père. Ils cherchent une famille plus grande. Moi je sais que je n’aurai pas d’autre famille que celle que tu as créée par ton combat et tes sacrifices. Mes sœurs ? Elles vont bien. Je crois qu’elles ont compris ce que tu leur as dit, même si elles ne l’appliquent pas toujours. Ton testament est bien réservé. il nous a été bien utile et nous le grderons pour toujours. Et dire que tu l’as écrit un demi-siècle avant de partir !

Grand Frère va bien aussi. Il est toujours là. Parfois, je ne comprends pas ce qu’il fait. Je crois qu’il est en train de refaire des erreurs que tu as faites et qu’il t’a reprochées. Mais lui il a moins d’excuses que toi. J’espère qu’il s’en rend compte. En tout cas moi je sais que Grand Frère ne te remplacera pas : nous aurons toujours un seul père et ça sera toujours toi. Avec Grand Frère nous ne nous sentons pas orphelins, mais tu nous manques terriblement.

J’ai quitté la maison Père. Je suis chez nos voisins, ceux-là même qui nous refusaient le droit d’avoir notre maison comme tout le monde. Je sais que tu les aimes bien. Ce n’est pas tant à cause de Grand Frère, c’est un peu plus compliqué. Beaucoup de mes frères aussi partent ailleurs. Mais nous ferons toujours partie de la famille, même si nous sommes loin.

On parle beaucoup de toi. Plusieurs disent du mal de toi et te reprochent de n’avoir pas été parfait. Qui est parfait dans ce bas monde ? Pas eux en tout cas. Tu as été un humain parmi les humains, mais à vouloir toujours bien faire les choses tu prenais parfois une allure divine. Les gens ne pardonnent pas aux dieux, Père, car les dieux sont parfaits. Moi je te pardonne, je sais que tu étais un Homme, un très grand Homme même s’il m’arrive de te prendre pour le Bon Dieu.

Je n’ai pas pleuré à ton départ, Père. Mais en ce moment j’essuie deux larmes qui coulent sur mes joues. Ne m’en veux pas Père.

lundi 2 avril 2007

2007, une année comme les autres

Qu’est-ce que vous attendez de 2007 ? Non pas pour vous mais pour le monde dans lequel vous vivez. Plus de paix, prospérité et d’harmonie. Moins de guerre, d’injustices et de souffrances. Bonne réponse, comment vous avez trouvé ?

C’est devenu tellement ennuyeux de faire des vœux en début d’année. En 2006 nous avons fait les mêmes vœux, et ça ne va pas mieux. En 2005, nous avons espéré beaucoup aussi, comme en 2004 d’ailleurs.

Oui, je suis pessimiste, je ne crois pas que l’année nouvelle va apporter à l’humanité un quelconque salut. Ne lisez pas ce qui suit si vous voulez garder un goût de fête sur la langue pendant encore quelque temps.

Alors sans prétendre à des dons divinatoires, voilà ce qui nous attend en cette nouvelle année, 2007 :

Chaque minute qui va passer pendant 2007, des enfants vont mourir de faim, de soif, ou de maladies. Leur seul tort, c'est d'être nés là où ils sont nés : pays pauvre, pays en guerre, familles défavorisées...etc. On s’en foutra, comme en 2006.

En 2007, il y aura des riches qui deviendront plus riches, et des pauvres qui deviendront encore plus pauvres. Personne ne s'en indignera. C’est ainsi depuis la nuit des temps.

Quelque part sur cette terre, en 2007, une guerre va éclater. Les gens vont s’entretuer jusqu’à ce que l’acte de tuer devienne des plus banals. Les innocents qui vont mourir, on ne les comptera plus. De toutes façons il n’y a plus d’innocents dans notre monde. On est dans un camp ou dans un autre. On est guerrier, contre son gré, parce que M. Ben Laden avait décidé ainsi. Parce que M. Bush sépare le monde entre les bons et les méchants, on n’a plus le droit de faire des choix.

En 2007, comme il en est toujours, l’histoire va se répéter encore une fois. Probablement en pire cette fois.

L’atmosphère va s’asphyxier encore plus. Les autres êtres vivants qui partagent avec nous cette planète bleue vont encore souffrir de notre présence. Dieu sait combien parmi ces bestioles vont disparaître à jamais. Mais ça n’émouvra personne.

En 2007, nous n’arrêterons pas notre course effrénée vers le progrès. Produire plus, gaspiller plus, polluer plus. Ceux qui ne gaspillent pas suffisamment feront des efforts pour gaspiller plus et mieux. Ceux qui ne savent polluer qu’avec des déchets ménagers apprendront désormais à polluer avec des déchets chimiques, ou mieux, nucléaires. On n’oubliera pas pendant 2007 qu’il est interdit d’arrêter le progrès, même si on fonce droit dans le mur.

Mais en 2007, il y aura sûrement plus de justice dans le monde. Des hommes braves rendront notre monde plus juste grâce à des attentats, guerres et assassinats qu’ils commettront. D’autres gens vont mourir, mais la justice va régner, enfin.

Il y aura aussi plus d’indifférence, plus de haine, plus de chaos. On deviendra plus individualiste en 2007. Mais on va espérer une bonne année, tout de même.

Nous penserons aux autres, en 2007, pour qu’en 2008, nous leur ferons les mêmes vœux. Ça dans le cas où ça serait encore nécessaire.

Car peut-être aussi que 2007 soit l’année de la délivrance pour nous tous. Peut-être qu’en 2007, quelqu’un là-haut, décide de mettre fin à tout ça. A ce moment là 2007 verra tous nos vœux exaucés. Nous verrons les anges de l’Apocalypse qui débarqueront, chargés de libérer la terre de notre poids. La couche d’ozone respirera enfin, en 2007. Notre planète ne sera plus obligée de supporter nos tortures. Les pauvres trouveront enfin le bonheur, et la justice règnera pour tous les opprimés. Grâce à ces anges, il n’y aura plus personne pour souhaiter une bonne année en 2008.

Les anges nous exterminent et la joie scintille dans leurs yeux. Sur leurs chars de feux, ils ont écrit avec des lettres de sang :

Bonne fin, damnés !